Ne pas rater vos classes virtuelles
Par Carlo BIANCHI – Formateur / Consultant en Ingénierie Pédagogique
Si vous voulez rater vos formations en classe virtuelle, vous n’avez qu’à reprendre les activités et les supports du présentiel pour les animer à distance !
Avec l’intention de « gagner du temps » un très grand nombre de personnes commettent cette erreur capitale, qui dégrade considérablement la qualité de leurs animations.
Et pourtant, il suffit d’un petit effort et d’un peu de méthode pour que le résultat de vos formations à distance soit impeccable.
Aujourd‘hui, même les irréductibles du présentiel admettent que la formation en classe virtuelle est une modalité de formation efficace, à condition de respecter certains principes.
Tout commence par un travail de conception ou de re-conception de vos contenus. Mais ne soyez pas effrayés, il ne s’agit pas de se lancer dans une lourde démarche d’ingénierie pédagogique proprement dite; il s’agit simplement de vous isoler pendant quelques heures et suivre les étapes décrites ci-après.
Accepter la différence et revoir les objectifs
Tout d’abord, arrêtez de comparer la formation en salle à celle devant l’écran. Ce sont deux modalités totalement différentes et il est tout à fait normal qu’en classe virtuelle il ne soit pas possible de réaliser exactement les mêmes activités qu’en présentiel. Donc, s’il n’est pas possible d’animer les mêmes activités, il ne sera pas toujours possible d’atteindre les mêmes objectifs pédagogiques. Et ça c’est une triste réalité, difficile à accepter, mais vous n’avez pas le choix !
Comme je l’explique dans l’article « Quand la visio tue vos formations », l’apprentissage conceptuel se fait aussi bien en classe virtuelle qu’en présentiel, mais dès qu’il s’agit d’atteindre des objectifs pédagogiques qui nécessitent une pratique gestuelle, ou la manipulation d’objets physiques, il faut accepter que la technologie ait encore des limites. Assez souvent, la formule blended (présentiel + distanciel) reste la meilleure solution.
D’abord les participants, ensuite le contenu
La principale différence entre un « expert » et un « formateur » est que l’expert dit ce qu’il sait et le formateur dit ce que les apprenants ont besoin de savoir. Donnez la priorité aux participants. Les messages, la théorie, le discours ne sont qu’une conséquence de l’adéquation Objectifs / Participants :
- Qui sont les apprenants ?
- Que savent-ils déjà sur le sujet ?
- Ont-ils déjà une première expérience pratique ?
- Quelles sont les questions qu’ils sont susceptibles de poser ?
- Quelles préoccupations ont-ils ?
- Ont-ils tous le même niveau ou il s’agit de groupes hétérogènes ?…
- Quel est le meilleur moyen d’atteindre les objectifs pédagogiques ?
- S’agira-t-il d’une réunion animée où chaque participant prendra une part active à la discussion ?
- S’agira-t-il d’un débat entre spécialistes avec des questions et réponses interactives de la part d’un large public ?
- S’agira-t-il d’une formation en petits groupes qui exige la mise en pratique des connaissances des participants ?
- Faut-il que les apprenants travaillent en ateliers séparés ?
Voilà une liste (non exhaustive) de questions qu’il est important de se poser avant de démarrer votre travail de conception.
Écrire l’histoire de votre formation
Lorsqu’on décide de concevoir une formation, il est tentant d’ouvrir PowerPoint et de commencer à écrire, mais commencer en créant des diapositives ou réutiliser des diapositives existantes, avant d’avoir préparé un scénario d’animation, ne vous permettra pas de produire une formation de qualité.
Imaginez que vous construisiez une maison en commençant par creuser les fondations, avant d’avoir dessiné un plan, ou en utilisant un plan qui ne correspond pas au terrain.
Appelez-le scénario, ou synoptique, ou script, ou déroulé… peu importe; ce qui compte est de commencer par mettre sur papier, minute par minute, votre future formation. Voici un exemple :
Je le sais, vous faites déjà ce travail « sans besoin de l’écrire » ! Mais le fait de formaliser votre pensée vous fera prendre de la hauteur, vous donnera une vision d’ensemble. Vous serez aussi rassurés sur le timing et sur la logique d’enchainement des activités.
Préparer la rencontre
Une classe virtuelle attrayante doit être interactive dès l’inscription des participants.
Le premier contact
Commencez à créer de l’interactivité dès la convocation, qu’au de la de l’aspect logistique et technique, pourrait également servir d’invitation à faire une ou plusieurs des choses suivantes :
- Échanger sur un forum de discussion (si vous avez une plateforme LMS).
- Regarder une courte vidéo.
- Imprimer un document contenant un exercice, qui sera utilisé pendant la rencontre en ligne.
- Poser une ou deux questions sur le sujet et montrer la synthèse des réponses en classe virtuelle.
Le but est de permettre à vos participants de rentrer en matière et de commencer à se préparer intellectuellement à l’apprentissage.
Les messages de rappel
Compte tenu des emplois du temps de plus en plus chargés, il sera probablement nécessaire de les solliciter ultérieurement avec des messages de rappel.
Par exemple, vous pouvez communiquer les règles de vie nécessaire au bon déroulement de la formation en ligne : fermer la boite des e-mails, mettre le smartphone en mode avion…
Et n’oubliez pas que tout le monde n’a pas la même dextérité avec les outils numériques. Expliquez donc, le plus clairement possible, point par point et de manière visuelle, les consignes pratiques pour une bonne connexion et les fonctionnalités de base de la plateforme de classe virtuelle que vous avez décidé d’utiliser.
À la connexion
Le premier contact direct en ligne est assez délicat. Si en rentrant dans la classe virtuelle un participant voit simplement un message qui dit : « Bienvenue, cette session démarrera à 10h00 » il sera obligé d’attendre et il aura un sentiment de solitude. Il ne restera certainement pas passif en regardant l’écran. Il aura très probablement envie de consulter ses e-mails ou de travailler sur un dossier en cours. Ces distractions pourraient aussi l’amener à rater les premiers instants de la formation.
Faites comme en présentiel, arrivez dans la salle virtuelle au moins 20 minutes avant l’heure. Vous n’aurez pas à subir le stress d’un démarrage improvisé et vous pourrez accueillir convenablement les participants et commencer à faire connaissance avec eux.
La phase d’accueil
Essayez de trouver des manières conviviales ou ludiques pour démarrer, en fonction de ce que les fonctionnalités que votre logiciel de classe virtuelle vous permettent de faire, par exemple :
Demander aux participants de réagir à une citation qui suscite la réflexion.
Les encourager à partager leurs premières questions sur le sujet.
Lancer un sondage d’opinions.
Proposer un brainstorming avec un nuage de mots.
Toutes ces activités doivent évidemment être en rapport avec le sujet de la formation. Elles peuvent faire référence au travail effectué avant le cours, ou donner un aperçu du contenu de la formation.
L’accueil ne doit pas être un moment d’enseignement ou un point d’apprentissage essentiel, car vous ne devez pas pénaliser ceux qui arrivent avec quelques minutes de retard. En tous cas, je vous conseille de démarrer à l’heure précisée dans la convocation, et cela pour ne pas pénaliser ceux qui arrivent à l’heure !
Le démarrage
C’est le moment de rappeler les très importantes règles de vie :
- Pour éviter de se couper la parole : parler à tour de rôle, après avoir levé la main.
- Pour éviter les bruits parasites : demander de désactiver le micro et le réactiver uniquement lorsqu’on doit parler.
- Pour limiter la surcharge de la bande passante : demander de se rapprocher de la borne wifi ou, encore mieux, de se connecter en filaire.
- Faire désactiver la webcam lorsqu’elle n’est pas nécessaire.
- …etc.
Passez ensuite à votre activité d’ouverture, en évitant le tour de table classique. Même si vous limitez le temps de parole de chacun à 30 secondes, et que vous avez un groupe de 15 apprenants, le 12ème participant n’interviendra pas avant au moins 6 ou 7 minutes, et le 15ème encore plus tard.
Un bon principe pour choisir l’activité d’ouverture est que tous les participants fassent quelque chose en même temps. Par exemple, une liste de questions pourrait être affichée à l’écran et les participants devraient y répondre dans le chat.
L’animateur peut aussi passer en revue une liste de questions, en demandant aux participants de lever la main chaque fois qu’une affirmation est vraie pour eux.
Quelle que soit l’activité choisie, elle ne doit pas laisser les participants inactifs.
Sélectionner les activités pour une implication maximale
Après avoir préparé le terrain, il est important de maintenir un rythme soutenu. Vous avez établi que les participants sont censés participer et prendre part à leur apprentissage. Vous les avez fait participer dès le début, il est donc important de maintenir ce même niveau d’énergie tout le long de votre session.
En moyenne, vous devriez impliquer les participants toutes les 4 ou 5 minutes. Cette fréquence permet de maintenir l’attention et la concentration sur l’apprentissage. Elle permet aux participants de ne pas s’ennuyer ou d’être distraits par ce qui se passe autour d’eux dans leur propre espace physique.
L’un des principaux avantages de l’utilisation d’une classe virtuelle est la quantité d’outils disponibles pour faire participer les participants.
Utilisez les fonctionnalités de votre plateforme
Selon la plateforme de classe virtuelle que vous utilisez, essayez d’exploiter au mieux les fonctionnalités qui sont à votre disposition.
Voici une liste des outils courants et les façons dont vous pouvez les utiliser pour susciter l’engagement individuel et collectif :
- Sondage : Poser des questions et faire réfléchir
- Chat : Encourager le dialogue, même pour ceux qui n’aiment pas prendre la parole
- Levée de main : Demander la parole – Répondre aux questions par oui ou non
- Partage d’écran : Présenter des slides, des vidéos, des applications…
- Quiz : Valider les acquis
- Audio : Interagir verbalement et encourager un dialogue ouvert
- Ateliers : Faire résoudre des études de cas – Préparer des jeux de rôle
- Tableau blanc : Fair rédiger des textes ou dessiner des schémas
Toutes les plateformes n’ont pas forcément toutes ces fonctionnalités. Si vous utilisez une plateforme simple, comme Google Meet ou Teams, il faudra compléter avec des logiciels tiers, de type Forms, Wooclap, Kahoot, etc… qui permettent également de varier les plaisir et de mettre de la couleur.
Faites preuve de créativité
Ne soyez pas bloqués par les limites de la technologie, surtout s’il s’agit d’animer des activités ludiques. Par exemple, si en présentiel vous avez l’habitude de donner la parole en lançant une balle en mousse d’un participant à l’autre, pensez à la façon dont vous pourriez le faire dans la classe virtuelle. Vous pourriez peut être sélectionner la première personne en tapant son nom dans le chat, puis lui demander de sélectionner la personne suivante, et ainsi de suite, jusqu’à ce que tout le monde ait été sollicité.
Si votre plateforme n’offre pas l’option travail en ateliers, vous pouvez faire travailler les participants en binômes, en utilisant le chat privé.
Préparer les ressources pour les participants
Les supports destinés aux participants peuvent être de nature diverse et variée. Il peut s’agir de documents imprimés envoyés aux participants à l’avance, ou de matériel partagé sur la plateforme de classe virtuelle.
Les ressources des participants ne doivent pas être une simple copie des diapositives de l’animateur; vous le savez très bien « les meilleures diapositives font les pire documents ». Les diapositives doivent contenir plutôt les instructions pour les activités, les questions des sondages et d’autres éléments qui ne seront pas du tout utiles aux participants après la formation.
Vous avez plutôt intérêt à fournir un document qui servirait d’aide-mémoire sur le terrain, ou un résumé des concepts évoqués, ou des conseils, de s techniques… c’est à dire, des informations que les participants utiliseront au quotidien sur leur lieu de travail.
Fare évoluer votre formation dans le temps
Si vous en avez la possibilité, organisez une session pilote, afin d’observer les réactions des apprenants et de perfectionner votre scénario. Profitez de cette occasion pour revoir votre timing, et l’enchainement des activités.
En tous cas, profitez de chaque session pour revoir et affiner vos supports. Vous pouvez recueillir les remarques des participants afin d’intégrer des suggestions et des améliorations. Ce retour d’information peut provenir de votre propre observation, ou par des échanges verbaux avec les stagiaires, ou alors par un questionnaire de satisfaction.
À chaque session, essayez d’obtenir un retour d’information sur :
- Le choix des activités
- Le déroulement et l’enchainement des épreuves
- Le matériel d’animation et les supports visuels
- Les instructions données aux participants
- La durée
Prenez l’habitude de fixer un moment précis où vous mettrez à jour les supports pour chaque session de formation, et à les marquer d’une date de version ou de révision.
Notre parcours de formation
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Les particularités de la classe virtuelle
Quel type de jeux utiliser ?
Exemples
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