EN QUOI LE JEU FAVORISE-T-IL LA MÉMORISATION ?
Du respect des rythmes d’apprentissage
Si l’on pense que la mémoire à court terme est associée aux codes sensoriels (lexical, imagé, sémantique, moteur, auditif) et que le jeu mobilise l’ensemble de ces sens, il apparait évident que le jeu favorise de manière particulière la mémorisation.
Nous savons depuis longtemps que les informations absorbées par les codes sensoriels sont très fugitives : elles sont conservées seulement quelques secondes afin d’être organisées ou d’en chercher le sens dans une autre mémoire, d’où l’intérêt de reprendre plusieurs fois les mêmes messages de différentes manières, et la répétition fait souvent partie des mécanismes d’un jeu de formation.
Répéter ne signifie pas redire plusieurs fois la même chose. En formation, la répétition est plus proche de la reformulation et consiste à reprendre le même concept sous différentes formes.
JOUER AVEC LES ÉMOTIONS
Dans le jeu le même concept est entendu, il est vu, il est expérimenté et ressenti également du point de vue émotionnel.
Les recherches en neurosciences nous ont donné la preuve de la dimension émotionnelle de l’apprentissage et du meilleurs ancrage des acquis dans la mémoire de long terme des activités qui ont stimulé des émotions chez l’apprenant.
Le fait que le jeu est un moment rare pour un adulte (en tous cas plus rare que chez l’enfant) et qu’il lui apporte du plaisir, il se souviendra plus facilement de ce qu’il a appris.
JOUER AVEC LE VISUEL
Parlons maintenant du sens le plus développé chez les humains.
Selon l’avis des spécialistes, la vision représente 50% de l’activité cérébrale et qu’environ 60% de la population mondiale est à dominante visuelle, d’où l’intérêt, en formation, de faire utiliser davantage ce sens.
Cette tendance est si forte qu’à chaque fois que nous lisons un texte nous tentons de visualiser ce qu’il dit. Mais le cerveau traite les textes et les images de manière différente.
Sans rentrer dans le détail du processus de traitement de l’information par le cerveau, il faut savoir qu’en moyenne on retient 10% des informations présentées oralement, mais si on y ajoute une image le score peut atteindre 65%.
Ce phénomène est expliqué par le simple fait que le cerveau reconnaît les mots comme plusieurs petites images, donc le traitement par la mémoire de travail est plus laborieux.
En regardant une vieille photo, oubliée depuis des années au fond d’un tiroir, nous voyons des gens dont nous avons oublié le nom et puis, petit à petit, les choses reviennent… L’image a des capacités phénoménales de rappeler des événements passés, en agissant sur la mémoire épisodique.
Les images sont particulièrement efficaces pour communiquer des concepts abstraits, par exemple, les idée comme la « liberté » ou la « qualité », qui demandent des phrases entières pour y attribuer du sens, peuvent être représentées par une seule image.
En revanche, il existe encore un doute à propos de l’apprentissage des langues, qui semblerait apprécier mieux d’autres médias.
RESPECTER LES RYTHMES BIOLOGIQUES
L’attention d’un apprenant chute automatiquement au bout de 10 minutes, on ne peut rien y faire, c’est un fait biologique.
La mémoire de travail, dont l’objectif est de traiter les informations à court terme a une capacité très limité, c’est-à-dire qu’elle peut retenir une moyenne de 7 (plus ou moins , c’est-à-dire entre 5 et 9) éléments simultanément pendant une durée d’environ 30 secondes.
Et ces données sont variables d’une personne à une autre, selon ses connaissances existantes, ou expériences vécues sur le sujet de la formation.
Un discours trop rapide est donc mémorisé de manière partielle par des participants ayant peu de connaissances, et un discours trop lent sera ennuyant pour ceux qui sont déjà initiés au sujet.
Permettre aux participants d’apprendre à leur propre rythme est une des clés du succès d’une formation ; et le jeu est parfaitement synchrone avec des rythme d’apprentissage des joueurs, car il est cadencé par leurs décisions et leurs activités.
Une équipe de chercheurs universitaires a confirmé ces hypothèses en montrant que dans l’apprentissage traditionnel, qui concerne la mémoire appelée « lexicale » (graphisme et phonologie du mot), le vocabulaire n’acquière des propriétés sémantiques qu’à la suite de réception d’informations contextuelles.
D’autres expériences menées par le même groupe de chercheurs en observant l’apprentissage « multi contextuel » ; c’est à dire, dans lequel on présente un mot selon diverses procédures : photos, démonstration en situation réelle, description théorique, appel aux souvenirs, etc. …, ont montré que les apprenants retiennent 45% des mots en apprenant par l’expérience et seulement 27% en apprentissage traditionnel.
Une autre étude, effectuée par un groupe élargi d’universitaire a montré que, en formation, l’acteur est beaucoup plus performant que le spectateur.
Dans le cadre d’un stage de trois semaines, dont le cours de gestion financière faisait objet de la recherche, 5 élèves de BTS étaient acteurs d’une pièce de théâtre et jouaient le rôle de sociétaires, les autres élèves restant spectateurs.
Les résultats des tests effectués après le stage en entreprise ont constitué la preuve qu’un apprenant, en position d’acteur, donc impliqué dans l’acte de formation, est plus motivé et performant : après le stage les acteurs ont eu un score de 80% de bonnes réponses et les spectateurs seulement de 30%.
Sources et références bibliographiques – JEU ET MÉMOIRE :
- Lieury & Forest, Les épisodes de la connaissance, Le Langage et l’Homme.
- Bachira Tomeh, Psychologie cognitive et formation, CNED / Université de Rouen, 1997.
- George Miller, The magical Number Seven, Plus or Minus Two : Some Limits on Our Capacity for Processing Information.