
LE VISUEL DANS L’APPRENTISSAGE
Des formations plus efficaces grâce à des visuels impactants
Par Carlo BIANCHI : Ingénieur Pédagogique & Concepteur de Jeux de Formation
Le visuel joue un rôle crucial dans l’apprentissage et la transmission des connaissances.
Que ce soit à travers des images, des schémas, des vidéos ou des graphiques, les supports visuels facilitent la compréhension, la mémorisation et l’engagement des apprenants.
Pourtant, leur usage doit être réfléchi pour éviter certaines erreurs.
Cet article explore l’importance du visuel, les idées reçues qui l’entourent, son rôle en formation et les outils à disposition des formateurs.
Les fonctions du visuel chez l’humain
Notre cerveau est particulièrement réceptif aux informations visuelles.
Environ 80 % des informations que nous recevons passent par la vue, ce qui en fait le sens dominant dans l’apprentissage.
Par ailleurs, notre cerveau traite les images 60 000 fois plus vite que le texte, d’où l’intérêt de soigner particulièrement les visuels de nos formations !
Voici quelques fonctions clés du visuel :
- Facilitation de la perception : Les images permettent d’organiser l’information et de la rendre plus accessible.
- Aide à la compréhension : Les représentations visuelles simplifient des concepts abstraits ou complexes.
- Renforcement de la mémoire : Le modèle du double codage expliqué par Allan Paivio en 1986, suggère que combiner texte et image améliore la rétention des informations. Un graphique ou une image marquante renforce l’encodage des informations dans la mémoire de long terme.
- Stimulation de l’attention et engagement : Un support visuel attractif capte plus facilement l’attention des apprenants.
Cependant, une surcharge d’éléments visuels peut aussi nuire à l’apprentissage, en saturant la mémoire de travail.
Le modèle VAK, un « neuromythe »
Le modèle VAK (Visuel, Auditif, Kinesthésique) prétend que chaque individu aurait un style d’apprentissage dominant. Selon cette théorie, un apprenant visuel retiendrait mieux avec des images, un apprenant auditif avec des explications orales et un apprenant kinesthésique par la manipulation.
Or, des recherches en neurosciences ont montré que ce modèle repose sur un mythe car :
- Les styles d’apprentissage ne sont pas fixes et varient selon les contextes.
- Un même individu apprend mieux en combinant plusieurs modalités.
- Ce qui compte, c’est l’adéquation du format pédagogique avec la nature du contenu (ex. : une carte pour la géographie, une démonstration pour la danse).
L’approche VAK a conduit à une survalorisation du visuel sans prise en compte des besoins réels des apprenants.
La puissance du Visuel dans l’Apprentissage
Les Neuromythes en Pédagogie
Conséquences d’un usage inadapté du visuel en formation
Le visuel est un puissant levier pédagogique, à condition d’être utilisé à bon escient. Un mauvais usage des supports visuels peut nuire à l’apprentissage :
- Surcharge cognitive : Trop d’informations visuelles empêchent la mémorisation efficace, par exemple, des diapositives avec une quantité excessive de textes (un phénomène connu sous le nom de « Death by PowerPoint ») risque de ne pas respecter les rythmes biologiques d’assimilation de l’information.
- Effet de distraction : Des images décoratives peuvent détourner l’attention du contenu essentiel.
- Illusion de compréhension : Un visuel mal conçu peut donner l’impression de comprendre sans réelle assimilation.
- Absence de pertinence : Un visuel hors contexte peut induire en erreur et si l’image ne sert pas le propos, elle crée de la confusion au lieu d’aider la compréhension. Par exemple, une infographie mal légendée ou un schéma trop abstrait peut perturber l’apprenant et lui faire perdre le fil du raisonnement.
- Dépendance aux supports : Si les supports visuels sont utilisés de manière excessive, ou uniquement pour « montrer » quelque chose, il y a risque de passivité et de lassitude.
Il est donc essentiel de concevoir des supports visuels qui favorisent réellement l’engagement et la compréhension.
Quelques conseils pour structurer vos supports de formation visuels
Parmi tous les principes pour concevoir des supports visuels, les seuls qui ont fait preuve de leur efficacité sont ceux décrits par Richard E. Mayer, professeur émérite de psychologie à l’université de Californie.
Les principes de Mayer sont basés sur la manière dont le cerveau humain apprend et sur trois fondations importante pour l’apprentissage multimédia :
- Double-canal: le cerveau utilise différent canaux pour traiter les différents types d’informations (audio, visuel, etc.).
- Capacité limité : chaque canal a une capacité limitée d’assimilation des informations.
- Processus actif : il y a apprentissage quand l’apprenant est actif.
Le clip vidéo ci-contre présente ces principes de manière synthétique.
IMPORTANT – Le mot « multimédia » peut être trompeur, car trop souvent associé à l’usage de l’informatique, alors que multimédia est tout simplement la combinaison de plusieurs médias.
Dans cet article nous considérons le multimédia tel que décrit par le Larousse : « Ensemble des techniques et des produits qui permettent l’utilisation simultanée et interactive de plusieurs modes de représentation de l’information ».
Les principes d’ergonomie multimédia
LES OUTILS VISUELS POUR LA FORMATION
La liste des outils présentés ci-après n’est pas exhaustive, mais assez représentative des pratiques courantes des professionnels de la formation.
1. Slides
Série de diapositives contenant du texte, des images, et des graphiques pour soutenir une présentation orale.
Avantages : PowerPoint (et ses homologues) est l’outil de formation le plus facile à utiliser, il est économique et disponible sur tous les ordinateurs. Les slides permettent de structurer l’information et soutiennent l’explication orale ; elles guident le discours du formateur.
Limites : Comme expliqué plus haut, il y a un risque de surcharge cognitive si les texte sont trop nombreux ou denses, dans ce cas, la diapo devient illisible en projection. Au lieu d’écouter l’explication, l’apprenant essaye de lire et ne retient ni l’un ni l’autre. Les slides peuvent également devenir monotones.
2. Paperboard
Le paperboard est un support physique avec de grandes feuilles de papier, utilisé pour créer une présentation en live, dessiner des schémas, ou formaliser les productions des participants qui travaillent en petits groupes.
Avantages : Disponible dans toutes les salles de formation, il permet « d’improviser » ou de décrire les détails d’un concept déjà abordé de manière succincte. Le paper est un complément à la présentation par diapositives.
Limites : Nécessite une écriture claire et bien lisible. On ne peut pas modifier ce qui a été écrit (risque de ratures).
3. Vidéos pédagogiques
Supports audiovisuels intégrant son et image, utilisés généralement pour expliquer des concepts ou des procédures.
Avantages : Dynamisent l’apprentissage, captent l’attention et facilitent la démonstration de processus. En présentiel elles peuvent être mises en pause et revues. En distanciel elles peuvent être visionnées avant ou après la formation en salle.
Limites : Nécessitent du temps et des ressources pour être produites. Elles peuvent distraire si mal conçues et nécessitent un bon équilibre entre durée et contenu (éviter les vidéos trop longues). Il peut également y avoir des risques techniques (connexion internet, problème de son, etc.)
4. Le cinéma
Contrairement aux vidéos pédagogiques, qui sont crées avec un contenu ad hoc, les clips cinématographiques sont des extraits de films grand public, ayant un lien de sens avec les contenus de la formation (exemple : un de nos confrères utilise des clips du film « Le diable s’habille en Prada », dans lequel une patronne tyrannique fait tout le contraire de ce qu’un bon manager devrait faire pour motiver son équipe).
Avantages : C’est un instrument ludique qui s’appuie sur le principe de la métaphore. Détend l’atmosphère dans les formations techniques parfois perçues comme trop sérieuses. Peut être également utilisé à distance, en entrée en matière d’une séquence de présentiel.
Limites : La préparation peut être chronophage et nécessite l’utilisation d’outils de montage vidéo.
5. Tableau blanc numérique
C’est la version numérique du paperboard, mais il peut faire beaucoup plus : manipuler des visuels, projeter des vidéos…
Avantages : La possibilité d’apporter des modifications en temps réel aux informations. Le partage informations en temps réel avec un public distant et possibilité de stocker les informations dans le cloud pour y accéder facilement à tout moment.
Limites : Il crée une dépendance à la technologie et nécessite une formation du formateur. Le prix est encore assez élevé.
6. Infographies
Combinaison de texte, d’images, d’icônes et de graphiques pour présenter des informations de manière visuelle.
Avantages : Synthétiser et simplifier des notions complexes. Rendre l’information attrayante et facile à comprendre.
Limites : Risque de privilégier l’aspect esthétique au contenu pédagogique. Peu adaptées aux contenus nécessitant une explication détaillée.
7. Cartes Mentales (Mindmapping)
Diagrammes qui représentent des idées et des concepts liés autour d’un sujet central.
Sur ce sujet, veuillez lire l’article détaillé en cliquant ICI
Avantages : Aident à organiser et à structurer les idées, avec des liens sémantiques et facilitent la mémorisation. Les bases des cartes mentales peuvent être préparées à l’avance et personnalisées et complétées en fonction des interactions avec les participants.
Limites : Peuvent devenir désordonnées avec trop d’informations.
8. Sketchnoting (prise de notes graphiques)
Prise de notes créative, à l’aide d’illustrations, de symboles et de lettres. (Ces dernières années, la popularité du sketchnoting s’est accrue, en raison de son originalité).
Avantages : Stimule la créativité, améliore la concentration et par conséquent la mémorisation. C’est un outil ludique avec un fort impact sur la dimension émotionnelle de l’apprentissage.
Limites : Nécessite de l’entrainement avant de l’utiliser en live en formation. Les personnes qui pensent ne pas être « bonnes » en dessin peuvent craindre ne pas être capables d’utiliser cet outil.
9. Posters
Supports visuels préparés à l’avance et affichés dans la salle de formation pour présenter des informations de manière concise et attrayante.
Avantages : Attirent l’attention et rendent l’information disponible en permanence, donc, facilitent la pratique du principe de la « répétition ».
Limites : Les posters doivent souvent être accompagnés d’explications ou de discussions pour être pleinement compris. Sans contexte, ils peuvent être mal interprétés. Peuvent être encombrants et difficiles à transporter.
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Conclusion
Le visuel dans l’apprentissage facilite la compréhension, la mémorisation et l’engagement. Toutefois, son efficacité dépend de son utilisation réfléchie et adaptée aux contenus et aux apprenants. Un excès de visuels ou un mauvais choix d’outils peut nuire à la pédagogie.
Chaque support visuel a ses points forts et ses limites. Pour une formation efficace, il est essentiel de varier les supports en fonction des objectifs pédagogiques et du profil des apprenants. L’important est de trouver un équilibre entre contenu structuré, interactivité et engagement des participants.
Les formateurs doivent donc privilégier des supports visuels pertinents, bien conçus et intégrés dans une approche multimodale. Mais aujourd’hui ce ne suffit plus, car les apprenants ont depuis longtemps l’habitude de se trouver face à des outils visuels. Le formateur doit alors faire preuve d’originalité pour surprendre et générer des émotions positives.
Références bibliographiques
- Mayer, R. E. (2009). Multimedia Learning. Cambridge University Press.
- Paivio, A. (1986). Mental Representations: A Dual Coding Approach. Oxford University Press.
- Pashler, H., McDaniel, M., Rohrer, D., & Bjork, R. (2008). Learning Styles: Concepts and Evidence. Psychological Science in the Public Interest, 9(3), 105-119.
- Sweller, J. (1988). Cognitive Load During Problem Solving: Effects on Learning. Cognitive Science, 12(2), 257-285.